Extraits Dialogue hors-série Prendre pouvoir sur l'écrit
Hors-série Prendre pouvoir sur l'écrit
Actes des 4èmes Rencontres Nationales sur l'Accompagnement
Saint-Denis, 2 & 3 avril 2011
Lire/écrire : difficultés et malentendus
Jacques BERNARDIN (p. 3)
Inutile de plaider ici l'importance d'une maitrise suffisante de l'écrit, indispensable pour la poursuite des études comme pour la vie personnelle, sociale et professionnelle. Quelles difficultés sont relevées dans les classes ? En lecture, une compréhension fragile voire aléatoire pour nombre d'élèves, des compétences d'inférences pas encore acquises au collège. A l'écrit, des compétences très hétérogènes (allant de la copie à la production autonome), avec des problèmes à divers niveaux : rapports phonies-graphies ; segmentation des énoncés ; syntaxe boiteuse ; textes peu cohérents...
Ces difficultés perdurent malgré les aides apportées. Qu'est-ce qui nous échappe ? Avant d'imaginer des alternatives, il est nécessaire d'identifier la nature de ces difficultés. Derrière l'erreur, à considérer comme symptôme, quels malentendus s'expriment ? C'est ce qu'il nous faut analyser pour que l'action pédagogique ne loupe pas son objet voire ne renforce pas les confusions... Malgré les apparences, ces butées récurrentes vis-à-vis de l'écrit ne sont pas seulement ni d'abord dues au bilinguisme. L'hypothèse, c'est qu'elles relèvent d'une distance perçue/vécue de façon diffuse par les élèves concernés entre usages familiers et usages scolaires en matière de langage, au-delà même des objets sur lesquels portent les échanges.
Mais explorons plus avant dans le domaine de la lecture puis dans celui de la production écrite ce qui fait problème, avant de débusquer ce qui en est au principe. Nous nous appuierons sur quelques recherches qui nous apparaissent assez emblématiques des points de vue de la recherche sur ces sujets.
Comment enter dans un texte pour le comprendre ?
Pascal DIARD (p. 10)
La « Lecture avec questions préalables », inventée par le GFEN, a l'avantage de donner envie de la transférer dans de multiples champs du savoir. (...) Il s'agit tout à la fois de mettre en question les questions (qui sont traditionnellement posées à la fin d'un texte comme exercice de vérification par l'enseignant d'une lecture conforme à sa propre interprétation du texte), en faisant partager ici le questionnement de l'enseignant, mais aussi de faire entrer dans une lecture critique, une lecture de compréhension plus qu'une lecture de restitution, et enfin de motiver celui qui ne s'est pas a priori investi pour lire ce texte-là, à se vouloir en recherche et en questionnement, pour lui-même et avec les autres, sur un objet appartenant à l'histoire humaine.
Les difficultés en lecture-écriture : et si on cherchait aussi à la prévenir ?
André OUZOULIAS (p. 17)
Devant l'aggravation des inégalités scolaires, qui se manifeste en dépit de la prolifération des dispositifs de « soutien », il est urgent de mieux comprendre la genèse des difficultés scolaires.
On ne peut alors faire l'économie d'un questionnement des pratiques dominantes : sont-elles judicieuses pour prévenir ces difficultés et aider tous les enfants à franchir les obstacles sur le chemin de la culture écrite ? On pointera les domaines dans lesquels une meilleure prise en compte de ces obstacles permet de dessiner les contours d'une pédagogie active et populaire. L'écriture et la production de texte dès la Grande Section y occupent une place dominante. (...)
D'où un exposé en deux parties :
- 1) Prendre au sérieux les obstacles à l'apprentissage du lire-écrire : Quels obstacles ? Comment aider les élèves à les franchir ?
2) Faire écrire des textes dès la G.S. : Comment faire écrire des enfants non lecteurs ? Quels textes ?
La lecture de la littérature, voie de (ré)conciliation des élèves en difficulté avec la lecture
Catherine TAUVERON (p. 28)
(...) L'élitisme pour tous, selon la formule d'Antoine Vitez, travailler la difficulté avec les élèves en diffculté, plutôt que de leur imposer un régime de sous-alimentation, tels sont les principes qui ont guidé ma recherche sur une cohorte d'élèves en difficulté de lecture suivis pendant deux ans. Son postulat : la lecture littéraire est l'une des voies possibles pour (ré)concilier avec la lecture les jeunes lecteurs reconnus en difficulté selon les critères traditionnels, du CP au CM2. Son objectif : modifier les représentations de l'acte lexique et le rapport à la lecture, et construire une culture, souvent manquante. Partant de l'hypothèse que « les mauvais lecteurs ont moins des difficultés techniques qu'une absence de représentation des profits symboliques qu'ils peuvent tirer de la lecture » on s'est proposé d'étudier avec précision les effets des variables didactiques introduites (choix de travailler la difficulté avec des élèves en difficulté sur des récits littéraires posant des problèmes circonscrits et surmontables de compréhension et/ou d'interprétation, susceptibles de surcroît de provoquer un investissement affectif et des émois esthétiques, ouverture d'un espace intersubjectif d'expression, de négociation de sens et d'entraide, explication des règles du jeu interactif et des stratégies possibles de lecture).
Débat littéraire : débattre pour devenir enquêteur de livres
Véronique VINAS (p. 39)
L'accès de tous à la culture et notamment à la littérature dont la littérature de jeunesse, semble être reconnue comme une question centrale à l'école et la présence abondante de livres de littérature de jeunesse dans les classes semble en attester. Or les œuvres de littérature jeunesse sont de pus en plus riches et complexes. Et si lire un album ou un roman, c'est non seulement le comprendre mais aussi accéder à de l'interprétation, la seule fréquentation des livres est-elle suffisante pour faciliter une transmission de la culture, pour devenir « lecteur expert » ? (...)
Autrement dit comment provoquer un questionnement des textes (différent d'une explication de texte) dans une discussion pour développer la compréhension et l'interprétation des textes (travail sur le sens), partager des émotions, élaborer des jugements... ? Que questionner et comment ? Quelles entrées du livre interroger pour repérer les difficultés que comportent les albums, les romans de littérature de jeunesse ? Comment relever le défi de la mise en débat des textes ?
Autant de questions incontournables et préalables auxquelles il est nécessaire de répondre pour répondre aux enjeux sous-tendant le développement d'une culture littéraire.
De la page blanche à la scène... Peut-on écrire quand tout le passé scolaire nous serine le contraire...
Yves BEAL (p. 43)
L'atelier d'écriture peut constituer un véritable outil pour prendre pouvoir sur l'écrit à tous les âges de la vie et quel que soit le cursus des participants. L'expérience évoquée, conduite depuis 4 ans avec l'atelier-relais de Givors (69), s'est mise en place depuis plusieurs années dans vingt lieux différents, avec des élèves d'écoles primaires, avec des clases de collèges, de lycée, de lycée professionnel, avec des élèves d'atelier-relais...
Atelier d'écriture « Provision pour l'hiver »
Yves BEAL (p. 47)
Une réflexion générale sur l'écriture entre recherche et création ; des hypothèses sur écrire en maternelle ; le descriptif détaillé d'un atelier : « Provision pour l'hiver », un atelier d'écriture créé à partir du livre Frédéric de Léo Lionni, dans le but de constituer une culture de référence en matière d'écriture de création avec de jeunes enfants de Cycle 1 et Cycle 2.
La dialectique du centre et de la marge. Dans les parages d'Alechinscky
Odette et Michel NEUMAYER (p. 52)
On pourrait dire, paraphrasant Abdelmaleck Sayad que le Centre s'est toujours nourri de la Marge et on pourrait ajouter : au prix d'une dénégation de ce qu'est la marge ? Celui d'une récupération partielle, en fonction de ses propres objectifs de centre ? Celui d'une assimilation, concept bien ambigu à la faveur duquel les valeurs, la culture du centre apparaissent comme point d'aboutissement d'un processus d'acculturation qui nie les cultures et les valeurs d'origine.
Comment lire ce qui se passe dans l'Accompagnement ? Et d'abord de quel « accompagnement » parlons-nous ? En proposant l'atelier de création « La dialectique du centre et de la marge à Dans els parages d'Alechinsky », nous prenons appui sur une expérience de plusieurs années dans la formation d'intervenants pour des dispositifs d'accompagnement à la scolarité, is en place par diverses Collectivités territoriales.
Apprendre à lire à apprendre l'Ecrit
Gérard CHAUVEAU (p. 65)
Depuis toujours, on parle de l'apprentissage de la lecture ou de la maitrise de langue écrite comme si l'enfant apprenti lecteur était confronté à un objet unique (ou à une seule dimension). La réalité est beaucoup plus complexe.
Au moment du Cours Préparatoire, l'enfant de 6-7 ans a sept choses à apprendre : ces 7 objets d'apprentissage constituent ce qu'on peut nommer l'Ecrit ou le monde (del') écrit. Chacun de ces objets est à la fois spécifique (il a ses caractères propres) et interactif. C'est ce que montre l'observation continue des bons lecteurs débutants de CP. Vers 6-7 ans, l'apprenti lecteur « en réussite » est un enfant qui rencontre les 7 objets - les 7 aspects - de l'Ecrit et qui va de l'un à l'autre tout au long du CP. Il progresse « en lecture à écriture » et s'approprie progressivement l'Ecrit en pratiquant le va-et-vient entre ces 7 objets.
Du texte littéraire aux concepts
technologiques : de Balzac à l'analyse fonctionnelle
d'un habitat
Jacqueline BONNARD, Philippe GESSET (p. 67)
Comment introduire une séquence en technologie par un texte littéraire ? C'est le défi que deux enseignants (un professeur de technologie et un professeur de lettres) d'un collège « Ambition Réussite » de Tours se sont lancés pour casser les représentations des enseignants qui pensent « que la littérature, ce n'est pas pour ces élèves en difficulté ».
Le nouveau programme de technologie au collège s'appuie sur des domaines d'application : les transports en classe de 6-me, habitat et ouvrages en 5ème, confort et domotique en casse de 4ème. On se situe ici en classe de 5ème.