N° 31 - octobre 2021
D'hier à aujourd'hui, les apports de l'éducation nouvelle au débat éducatif
Jacques BERNARDIN (GFEN)
Il
est bien difficile de parler de l'éducation nouvelle au singulier, tant
les courants qui la composent sont divers au niveau de la philosophie
qui les inspire comme à celui des outils et méthodes qui les
caractérisent. L'amalgame prête le flanc aux critiques et procès, mais
aussi aux récupérations idéologiques : de la condamnation des «
pédagogistes » au nom d'une culture qu'ils sont censés négliger à la
promotion d'une éducation « alternative »... mais privée, le conservatisme
élitiste prospère, sur fond de dégradation du crédit de l'école
publique. Cela posé, quels éléments singularisent l'apport de
l'éducation nouvelle au débat éducatif ?
Interroger les finalités éducatives
Si
l'éducation vise l'insertion dans la société, doit-elle se plier aux
seuls besoins de l'économie, prioriser l'accès à l'emploi et la
reconduction de l'ordre social, comme cela a prévalu historiquement ?
Depuis
ses origines — qu'on peut faire remonter, dans ses aspirations, au
siècle des Lumières - l'Education nouvelle vise essentiellement l'émancipation
intellectuelle, la capacité pour chacun de penser par soi-même tout en
s'inscrivant dans une socialisation élargie, de participer aux débats de
son époque et de contribuer à l'évolution des rapports sociaux. C'est
de ce point de vue qu'elle juge les méthodes : au-delà même des contenus
d'apprentissages explicites, à quelles finalités préparent-elles ?
Pour la Ligue Internationale (LIEN) fondée en 1921, en réaction à la boucherie de 14-18, « L'éducation
Nouvelle prépare chez l'enfant, non seulement le futur citoyen capable
de remplir ses devoirs envers ses proches et l'humanité dans son
ensemble, mais aussi l'être humain conscient de sa dignité d'homme ».
L'esprit revanchard, l'acceptation fataliste de la guerre apparaissent
comme les conséquences d'une éducation de la répétition, corsetée et
autoritaire, qui exalte le nationalisme. Critique d'une Ecole basée sur
l'individualisme et la rivalité compétitive, qui classe, trie et
hiérarchie, générant frustrations et ressentiment.
L'exigence de justice
L'Education Nouvelle a inspiré, accompagné, légitimé et outillé la démocratisation
de l'Ecole, de façon officielle parfois, clandestine très souvent, au
gré des époques : exigence de démocratisation structurelle (une même
école pour tous) et culturelle (lutte contre l'échec scolaire, droit à
la réussite) .
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