Extraits Dialogue n° 172
Dialogue n° 172 - Actif(s) pour apprendre
Editorial
- Pédagogies actives : L'activité en question(s) Lire
Jacques BERNARDIN
Qu'est-ce que l'activité d'apprendre ?
- Mobiles, buts et moyens de l'activité
Jean-Yves ROCHEX, professeur à Paris VIII
Les lignes qui suivent sont extraites de l'ouvrage de J.-Y. Rochex, Le sens de l'expérience scolaire, publié aux Presses Universitaires de France, en 1995 (pages 41 à 52).
Pour Vygotski et Leontiev, le concept central de la psychologie est celui d'activité [...], activité qui est celle du sujet mais qui le transforme en s'exerçant sur des objets, matériels et idéels, distincts de lui. [...] Leontiev distingue trois « é1tages » ou « fonctions » de l'activité. - Interroger l'activité qu'est apprendre
Odette BASSIS, Présidente d'honneur du GFEN
La question majeure concernant la « pédagogie active » est de clarifier ce qui est mis sous le couvert de l'activité : de quelle activité parle-t-on ? À propos de quoi ? En vue de quoi ? Car il s'agit d'aller jusqu'à la raison d'être de l'activité mise en jeu pour en saisir les modalités. Et c'est là où sont interrogées les finalités elles-mêmes de ce qui est entendu sous le terme de «pédagogie active ».
L'objet de cet article est d'explorer – tout au moins d'amorcer une exploration – dans ce qui se joue comme implication active de l'apprenant dans le vécu d'une démarche de construction du savoir à partir d'une situation mise en jeu. Ce qui suppose, en amont, de la part de l'enseignant, l'élaboration décisive d'une telle situation possible, propre à engager précisément l'activité réflexive de l'apprenant et des apprenants entre eux. - Pédagogies actives : L'activité en question(s)
Jacques BERNARDIN, Président du GFEN
Ce texte est extrait d'une communication au Colloque international de la Commission communautaire française Regards croisés sur les pratiques en pédagogies actives les 21-22-23 mars 2018 à Bruxelles
[...] La pédagogie active se décline de diverses façons. Pour John Dewey, on apprend en faisant (« Learning by doing »), Decroly promeut les classes-ateliers, Freinet parle de tâtonnement expérimental, de pédagogie du travail. Terme pivot, l'activité est un terme suffisamment usuel pour ouvrir à différentes interprétations et mises en oeuvre, tant du côté des enseignants que des élèves, avec des effets inégalement propices à l'apprentissage... Arrêtons-nous un instant sur cette notion, ses ambiguïtés mais aussi ses ressorts. - Dévoiler l'activité apprenante et en prendre soin
Marc DURAND, Professeur honoraire de l'Université de Genève
Luc RIA, Professeur des universités de l'Institut Français de l'Éducation de l'ENS de Lyon
Philippe VEYRUNES, Maître de conférences HDR émérite de l'Université de Toulouse
Les intérêts des chercheurs et des praticiens de l'éducation convergent sur l'objet activité, et particulièrement l'activité apprenante. Dans les lignes qui suivent, nous pointons quelques éléments de signification de cette convergence, à la lumière de nos recherches empiriques sur les activités en classe.
Ce-faisant, nous argumentons deux idées. La première est qu'au fondement du métier d'éducateur, est l'intention fondamentale de connaître et comprendre l'activité d'autrui pour la transformer. En d'autres termes, enseigner n'est pas fondamentalement pensé comme un travail visant à faire apprendre des savoirs à quelqu'un, mais à faire en sorte que se transforme et s'enrichisse son activité, ce qui peut se traduire à tous les plans de l'activité humaine, dont celui des connaissances et des savoirs. La seconde est que cette intention s'actualise dans un agir des enseignants et des élèves qui est radicalement incertain et indéterminé. De sorte que nous considérons vaine toute conception déterministe de planification in extenso de la pédagogie et de ses effets sur les élèves.
- Gare à la consigne ou Jacques, son maître et les receveurs de consignes
Sylviane MAILLET
Le maître ne disait rien, et Jacques disait que la consigne en éducation est une bien étrange chose puisqu'après avoir cherché sa définition dans le dictionnaire Larousse il n'y avait relevé que deux définitions, relevant de l'esprit militaire :
- Instruction formelle donnée à un militaire, fixant sa mission dans diverses éventualités du combat ou du service de garnison.
- Instruction formelle donnée à quelqu'un, qui est chargé de l'exécuter : j'ai la consigne de ne rien dire.
Aucune allusion à la pédagogie ! Les deux mots « instruction formelle » voilà qui faisait bien peur aux oreilles de Jacques. De par cette origine à caractère militaire, il se demanda s'il en était de même avec tous ceux qui recevaient des consignes, notamment les élèves. Certaines consignes n'étaient-elles pas reçues comme un ordre indirect ? - Le rôle de l'action dans l'élaboration de la pensée chez Piaget et Wallon
Catherine LEDRAPIER
De l'action à la pensée, quelles références théoriques ?
Piaget et Wallon sont pris très fréquemment en référence au GFEN. Tous deux très impliqués dans le combat pour l'enfance et notamment l'amélioration de l'éducation ; tous deux constructivistes, montrant comment l'enfant construit ses savoirs et sa personnalité dans l'activité. S'ils ont également en commun le fait de voir en l'action la source de la pensée, pour ce qui est de leur théorisation du processus de passage de l'action à la pensée, tout les oppose, et très profondément. Ces oppositions, internes au constructivisme, ont alimenté plus de 30 ans de controverse. Je vais rapidement présenter cette polémique, en présentant d'abord les positons de Piaget puis les critiques que Wallon lui opposa. - Enquête sur le constructivisme
Maria-Alice MÉDIONI, secteur langues du GFEN
La préoccupation pour la « mise en activité » de l'apprenant, sans que soient définis le type d'activité et le pour quoi faire de cette activité, rencontre aujourd'hui les arguments développés par les « pédagogies actives » dans lesquelles on range d'ordinaire et de façon indiscriminée les mouvements d'Éducation nouvelle qui se réclament du courant constructiviste. Mais que reste-t-il du constructivisme dans les souvenirs des enseignants à l'entrée dans le métier, à l'issue de leur formation ? Une enquête empirique menée auprès d'enseignants de la maternelle à l'université a donné des résultats que l'on pourrait considérer comme particulièrement surprenants.
- L'enseignement de la philosophie peut-il s'inscrire dans les pédagogies actives ?
Rémy DAVID
La leçon de philosophie fonctionne comme un exemple, un modèle de la pensée que les élèves devraient pratiquer, sans toujours parvenir à leur expliquer comment. Quelle est donc l'activité des élèves dans cette pédagogie spécifique de la philosophie ? La majorité des enseignants de philosophie considère que la « philosophie est à elle-même sa propre pédagogie », et qu'aucune pédagogie venue de l'extérieure, ni aucune mode pédagogique ne devrait lui indiquer comment enseigner. La réflexion sur l'enseignement de la philosophie serait à la charge de la philosophie, ce qui alimente allègrement le refus des sciences de l'éducation. - L'activité est un élan de vie
Michel NEUMAYER
La polysémie du terme "activité" est une mine pour qui veut aller au-delà des apparences et comprendre le travail humain : qu'il s'agisse de celui de l'enfant qui apprend ; de l'opérateur en entreprise ; du pédagogue dans sa classe ; ou encore, pourquoi pas, du créateur. Pour quelle raison suis-je à évoquer un créateur dans ce contexte ? Peut-être parce que l'atelier sur lequel je m'appuierai est un atelier d'arts plastiques. Cependant, au-delà de l'exemple – il est à mes yeux très éclairant - c'est bien de travail dont on parlera et d'activité. Non pas de "méthodes actives", l'expression pourrait laisser penser que certaines le seraient plus que d'autres ? - La grammaire comme objet de construction des savoirs
Eddy SEBAHI, ESPÉ de Lyon, Secteur Langues du GFEN
Plutôt qu' « enseignement de la grammaire », je parlerais de formation à la « compétence grammaticale », comme cela apparait dans le CECRL en tant qu'elle n'est qu'une composante des 5 compétences linguistiques (lexicale, sémantique, phonologique, orthographique, orthoépique).
Ex-professeur d'anglais en collège, désormais formateur en ESPÉ où j'interviens aussi bien dans la formation linguistique de futurs enseignants non spécialistes que dans la didactique des langues des premier et second degrés, j'ai repris et développé — voire transformé — certains outils et dispositifs que j'avais commencé à utiliser avec des élèves, notamment de 4ème et 3ème. - Une écriture « coutumière » pour (ap)prendre la parole à l'écrit
Caroline GABRIELE LOVICHI
8 h 05 environ, l'appel est fait, les affaires sont sorties. L'écriture coutumière peut commencer. Je donne la consigne suivante aux élèves : « Écrivez pendant cinq minutes ». À l'issue de ce temps, les volontaires peuvent lire leur texte. Lors de la première expérimentation de cette démarche, la consigne a déconcerté la majorité des élèves. Au début, je n'écrivais pas avec eux, désirant rester disponible pour répondre à leurs questions. Beaucoup d'entre eux n'avaient pas d'inspiration et me demandaient des thèmes. Je leur en donnais sans les avoir pensés en amont, c'était ce qui me passait par la tête sur le moment : raconte ton rêve, décris la salle où nous sommes, tes camarades, imagine-toi dans dix ans, exprime comment tu te sens... Samia (6e), par exemple, avait parfois besoin de thèmes, parfois non. Je ne refuse pas cette aide qui semble parfois nécessaire à quelques-uns. - Pourquoi débattre en classe de philosophie en terminale ?
Lucie CHANU
En contact permanent avec des élèves de milieux sociaux défavorisés, les méthodes d'enseignement les plus répandues comme le cours dialogué ou la correction magistrale d'exercices type bac faits en classe ou à la maison m'ont vite semblé mettre en échec une grande partie de mes élèves. C'est la raison pour laquelle je me suis intéressée il y a maintenant une dizaine d'années à la pédagogie Freinet et plus largement aux pédagogies coopératives mais aussi à la pratique de débats formalisée notamment par Michel Tozzi. - S'approprier une démarche. Une alternative au vécu. Le jeu des 7 erreurs/différences
Maria-Alice MÉDIONI, Secteur Langues du GFEN
Une des caractéristiques de la pratique de formation au GFEN, c'est de respecter le principe d'homologie entre la situation de formation et ce que l'on vise à impulser sur le terrain.
C'est pourquoi nous proposons dans nos formations, aussi bien à l'interne comme lorsque nous travaillons avec des partenaires, de faire vivre les situations plutôt que d'en faire le récit ou d'apporter un témoignage.
Les participants, en s'impliquant dans le travail concret proposé par la situation, apprécient de la savourer autrement, et de mieux en comprendre les ressorts et les enjeux grâce à l'analyse réflexive à laquelle ils sont conviés, à la fin ou pendant des moments de régulation.
Toutefois, dans le cadre du partage de nos pratiques, tel que nous le mettons en oeuvre au Secteur Langues, il m'a semblé intéressant de réfléchir à une forme de travail qui permette d'expérimenter, pour soi-même et avec les autres, le travail d'élaboration d'un atelier ou d'une démarche.
- Édito
Michel NEUMAYER (GFEN)
"École active", "activité", quelles stratégies pour que l'École bouge ? Les termes sont riches. D'un pays à l'autre, au sein même du LIEN, les réalités quotidiennes dans les écoles sont différentes. Des choix pédagogiques nous réunissent mais les stratégies de transformation varient. C'est ce que ce supplément entend mettre en lumière, notamment à travers la notion d'activité le prisme du débat "école publique (d'état comme en France / de réseaux et collectivités territoriales comme en Belgique /cantonales en Suisse) versus "écoles privées d'Éducation nouvelle" (Suisse, France). - Pédagogie active et éducation nouvelle
Catherine LEDRAPIER (GFEN)
Le lien est authentique et son histoire permet d'en comprendre la nature. Pour faire court, posons le raccourci romancé suivant. Grâce à Rousseau qui donne une nouvelle vision de l'enfance et montre comment l'école maltraite l'enfance, des écoles nouvelles jaillissent un peu partout dans le monde pour s'opposer à l'école traditionnelle, d'où leur dénomination de "nouvelles". - Des écoles privées au service de l'école publique
Étiennette VELLAS (GREN)
Michael Huberman fut un des fondateurs de l'École Active de Genève, une école privée, qui l'est toujours, et qui, aujourd'hui, est membre du Groupe romand d'Éducation nouvelle. Il est l'un des co-auteur du traité classique Innovation et problème de l'éducation (1980), ouvrage qui faisait suite à plusieurs recherches menées dans le cadre de l'Unesco, de l'OCDE et du BIE. - Une école, deux écoles, des écoles...
Claire DESCLOUX (GREN)
L'école, lieu de vie, lieu d'apprentissages, lieu d'acquisitions de savoirs oui, mais, comment faire ? Écoles privées, écoles publiques, sommes-nous guidés par des valeurs, des théories, des pratiques, semblables ou dissemblables ? Ou peut-être par tout cela à la fois ? - «La source» école privée sous contrat, 73 ans d'éducation nouvelle
Charles ROSSI
Un peu d'histoire. François Chatelain et Roger Cousinet fondent en 1945 l'Ecole Nouvelle Française et créent La Source en 1946. Son objectif : «substituer à l'enseignement du maître, l'apprentissage de l'élève». - En Belgique partout
Charles PEPINSTER (GBEN)
Des écoles à pédagogie du chef-d'oeuvre ont trouvé un terrain favorable en Belgique pour se développer en toute légalité surtout dans l'enseignement public. Tendez l'oreille et jetez un oeil, je vous explique le lien.
- Écoles/familles : les parents sont des transmetteurs de savoirs
Marie-Rose RODRIGUES MARTINS
Si l'unanimité semble faite sur la nécessité de construire un partenariat école/familles « s'il appartient à chacun, quelle que soit sa fonction, de tout mettre en oeuvre pour améliorer l'implication des parents », si l'idée de collaboration est réaffirmée dans le référentiel de compétences des professeurs des écoles et dans le B.O. du 17 janvier 2013 sur l'accueil en école maternelle et les programmes de 2015, il reste dans la plupart des écoles bien des problèmes pour initier la réflexion et impulser les actions qui permettent d'y parvenir. - Apprendre à interroger les pratiques langagières et construire le pouvoir de la parole dès la maternelle
Colette CHARLET
Il y eut des paroles d'interpellations fécondes qui ont accompagné les orientations de mon travail d'enseignante maternelle, puis en réseau d'aide spécialisée et qui m'incitèrent à opérer des ruptures. Ce furent celles du GFEN lors d'un congrès de l'AGEEM de l'époque, au milieu des années 70, par l'intervention de collègues impliquées dans le mouvement, nous incitant à être attentif à ce qui se passait dans nos classes, dans la tête des enfants silencieux ou en révolte, de nous interroger sur leur devenir scolaire après l'école maternelle en lien avec l'origine sociale. En formation, on abordait rarement ces questions. Il y avait comme une résignation face aux difficultés. On n'osait pas poser publiquement la question de la fabrique de la ségrégation scolaire.